Chapitre 4
La maison de l'Oracle était construite à même la paroi rocheuse, faite de pierre et de bois, elle était visiblement très ancienne et supportait bien le poids de l'âge et du froid. Winda agrippa le heurtoir sur la porte et commença à tambouriner. Aucune voix ne se fit entendre dans le chalet, Winda recommença, cette fois-ci une voix étouffée nous poussa à entrer.
Winda entra la première et s'annonça.
«Oncle, nous avons besoin de votre aide.»
Alors l'Oracle serait l'oncle de Winda? Espérons qu'il soit aussi conciliant, mais plus bavard, que son frère. Il fit finalement son apparition de derrière les rideaux au fond de la pièce.
«Winda, ma chère. Comment vas-tu?, dit-il en la serrant dans ses bras.
—Bien oncle, je t'apporte un homme dont il faut que tu lises l'avenir.»
Il se décala légèrement sur le côté de façon à avoir une vision complète de ma personne. Il m'évalua rapidement puis s'approcha de moi, comme tous les Gusto il possèdait des cheveux verts mais les siens étaient bien plus foncés que la plupart des autres, cela rajoutait une profondeur à ses yeux clair qui lui donnaient un air presque mystique.
«J'ai reçu un oiseau de Windaar, tu dois être Neo, n'est-ce pas?
—C'est exact, j'ai quelques questions à vous poser, m'empressais-je.
—Doucement mon garçon, dit-il en se dirigeant vers son bureau, tout d'abord il va falloir que je t'examine. Approches et assieds toi»
Il me fit signe de m'asseoir en face de lui, je fis comme il me dit. il sortit des bibelots d'une étagère qu'il disposa dans une organisation anarchique sur la table, des cailloux, des os, des bouts de bois et ce qui ressemblaient à des pierres précieuses, une fois le tout réuni il se rassit et commença à me poser ses questions.
«Neo, je veux que tu me racontes ton histoire pour commencer.»
Je racontais exactement ce que j'ai raconté à Windaar auparavant, en omettant le moins de détails possible. Il m'écouta attentivement, presque captivé par mon récit. Quand j'eus fini, il reprit la parole.
«Je vois donc tu n'es plus chez toi ici, et tu cherches à rentrer… Je vais voir ce que je peux faire pour toi.»
Il bougea alors ses instruments dans une organisation ésotérique dont la logique me dépassait, s'équipa d'une branche, tordue de façon à former un anneau, et commença à réciter ses incantations les yeux fermés comme pour voir quelques choses que l'on ne pourrait pas voir avec de simples yeux. Quand il eut finit il reposa finalement sa branche et garda les yeux fermés un moment en silence. Quand il les rouvrit son expression me fit froid dans le dos, il me fixa de ses yeux, plus profonds que jamais. Je devais savoir.
«Qu'avez-vous vu?»
Toujours le silence, son air était effroyable, comme s'il avait vu un fantôme. Il finit par se tourner vers Winda.
«Le village… Empire.», prononça-t-il avec peine.
Elle se leva prestement, s'approcha de son oncle, le fixant du regard comme pour réfuter ce qu'il venait de dire, le faire mentir. Pendant un instant je croyais qu'elle allait pleurer. Finalement elle tourna les talons et commença à courir vers la porte, Selm la poursuivit pour l'arrêter. Le blizzard s'était aggravé, sortir maintenant serait suicidaire.
Je restais là, face à cet Oracle pétrifié, je devais tout de même savoir.
«A mon sujet, qu'avez vous vu à mon sujet?»
Il dégluti et prononça finalement une phrase entière.
«Ils ont besoin de toi Neo. Aides les je t'en supplie.»
Je ne savais pas quoi faire avec ça, je décidais de le laisser là et de poursuivre Winda aussi. Selm l'avait rapidement rattrapé, il étaient assis au sol et il la tenait contre lui mais elle se débattait, criant qu'elle devait rentrer au village aussi vite que possible.
«Il est encore temps! On peut toujours les sauver! Laisse moi partir, s'il te plaît!… S'il te plaît…»
Sa voix finit par devenir inaudible et se transforma en un pleur continu qui se réverbérait dans l'écho de la montagne comme un millier de plaintes.
Selm restait silencieux et ferme, sa tristesse était perceptible mais il ne se résolvait pas à la laisser partir. C'était trop tard, il fallait se rendre à l'évidence. Je m'approchais de ces deux, m'arrêtant à mi-chemin pour ne pas m'imposer, préférant les laisser pleurer leurs morts en paix.
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